Si vous êtes entrepreneur, chef d’entreprise, et que votre entreprise devient mature, peut-être avez-vous déjà concédé qu’il était dommage de laisser dormir de la trésorerie non exploitée. Parfois, il existe de belles fenêtres d’opportunités pour investir dans le développement de l’entreprise ou dans un nouveau projet professionnel, mais ce n’est pas toujours le cas.
En revanche, il est toujours possible de valoriser votre trésorerie. L’idée est de ne pas laisser, année après année, l’inflation éroder vos réserves. Dans le meilleur des cas, cela peut vous éviter de devoir souscrire à un emprunt et de payer des intérêts pour des projets sur lesquels votre trésorerie pourrait être largement suffisante.
De plus, si vous décidez, en tant que chef d’entreprise, de ne pas vous verser de dividendes parce que vous n’en avez pas besoin, valoriser votre trésorerie vous permettra de faire travailler cet argent en attendant de futures sorties.
Comment valoriser votre trésorerie d’entreprise ?
Votre trésorerie, ou pour être plus explicite, les réserves financières de votre entreprise, constitue la ressource la plus liquide dont vous pouvez disposer au sein de votre société. Les fonds en question sont directement disponibles afin de couvrir notamment les besoins en fonds de roulement et les dettes à très court terme. En cas de besoin, elle intervient également comme un matelas de sécurité afin de couvrir d’éventuels imprévus qui peuvent occasionner ce que l’on appelle des chocs de trésorerie (typiquement, la crise sanitaire survenue en 2020).
Cette distinction est importante puisqu’il va s’agir de décomposer votre trésorerie en différents compartiments.
D’une part, un capital qui demeure constamment disponible quelles que soient les circonstances. Celui-ci ne pourra alors être placé que sur des comptes liquides tels que des livrets ou des comptes à terme.
Il s’agit de la part de trésorerie dont vous aurez régulièrement besoin dans le cadre de votre activité. D’autre part, la trésorerie inexploitée (on utilise souvent l’expression « laisser dormir » sa trésorerie), sur laquelle il est possible de travailler afin d’aller chercher de la performance pour au moins compenser les effets de l’inflation.
La première étape dans une réflexion de valorisation de trésorerie consiste donc à déterminer vos besoins en fonds de roulement pour effectuer cette distinction. Une mauvaise estimation peut être à l’origine d’un incident de liquidité, ce qui pourrait mettre votre société en péril.
Quelles enveloppes d’investissement choisir pour valoriser votre trésorerie ?
Le contrat de capitalisation, l’assurance-vie du chef d’entreprise ?
Maintenant que l’on a déterminé l’enveloppe disponible, il est temps de songer à la manière d’investir ces montants.
Il existe une enveloppe fiscale bien connue dans le milieu professionnel qui est le contrat de capitalisation.
Celui-ci, dans les grandes lignes, fonctionne comme une assurance-vie, à quelques nuances près que nous détaillerons par la suite. Son intérêt majeur est qu’il est possible de souscrire à un tel contrat en tant que personne morale.
A l’intérieur de celui-ci, on retrouve également les supports accessibles à travers une assurance-vie. Il y a ainsi la possibilité de placer votre capital sur des fonds en euros, peu rémunérateurs mais offrant la sécurité du capital garanti, et des unités de compte, c’est-à-dire des supports financiers et immobiliers tels que des OPCVM, des obligations, des actions cotées ou non-cotées, des parts de SCPI, etc…
En fonction des besoins que vous envisagez concernant l’usage de votre trésorerie à moyen/long terme, vous pourrez ainsi choisir d’aller chercher de la performance ou au contraire de minimiser le risque.
En termes de gestion, à l’instar de ce qu’il se fait pour d’autres contrats tels que le PEA, le CTO ou l’Assurance-Vie, vous aurez le choix entre une gestion libre (comme son nom l’indique, vous prenez vos propres décisions d’investissement), une gestion pilotée (vous déléguez la gestion de votre portefeuille à un professionnel), et la gestion conseillée (hybride des deux précédents modes, par lequel vous accédez aux conseils d’un professionnel tout en gardant la main sur la décision finale).
Vous l’aurez compris, en termes de gestion, pas de grande surprise. Intéressons-nous maintenant au cadre fiscal du contrat de capitalisation. Tout d’abord, celui-ci est accessible que votre société soit soumise à l’IR ou à l’IS. Si vous avez opté pour l’IR, alors votre fiscalité en cas de rachats sera la même que pour une personne physique.
Concrètement, les primes versées après le 27 septembre 2017 seront fiscalisées à hauteur de 30% si le contrat a moins de 8 ans (soit 12.8% d’IR et 17.2% de prélèvements sociaux).
Si le contrat est plus ancien, le taux d’IR est ramené à 7.5% pour la fraction des primes versées inférieure à 150 000€.
Pour les primes versées avant 2017, un prélèvement forfaitaire de 15% s’applique jusqu’à 8 ans de détention, 7.5% au-delà. Dans les 2 cas, il est possible sur option d’être soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
Exemple d’une valorisation de trésorerie Findgest
Supposons que Monsieur Findgest ait ouvert un contrat courant 2015. Il perçoit au 27 septembre 2017 une plus-value de 10 000€. A l’heure actuelle, son contrat a réalisé 20 000€ de plus-values supplémentaires. Son contrat a désormais 8 ans.
Ainsi, en cas de rachats, il doit payer 15% x 10 000 + (7.5% + 17.2%) x 20 000 = 6 440€.
Si vous avez opté pour l’IS, vous devrez vous acquitter annuellement d’un prélèvement forfaitaire qui ne dépend aucunement de la performance de votre contrat.
Celui-ci correspond à 105% du taux moyen des emprunts d’Etat. Si votre contrat comporte un montant de 100 000€, alors avec un TME à 3% vous subirez un prélèvement de 3% x 105% x 100 000 = 3 150€.
Lors d’un rachat, un ajustement est effectué par rapport à la performance réelle du contrat. L’éventuelle plus-value réalisée est alors taxée à l’IS.
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Quels sont les critères à respecter avant de valoriser votre trésorerie d’entreprise ?
Pour que votre société soit éligible, vous devrez toutefois respecter certains critères. En effet, le contrat de capitalisation n’est accessible qu’à des organismes à but non-lucratif ou à des sociétés ayant pour principal objet la gestion d’un patrimoine mobilier et immobilier.
En d’autres termes, le mieux reste pour vous d’utiliser une holding (voir notre article sur les holdings) au sein de laquelle vous ferez remonter la trésorerie de vos sociétés d’exploitation. C’est pour cette holding que le contrat sera alors ouvert.
Il est à noter également qu’avec des montants conséquents, il est possible de nantir son contrat afin de pouvoir bénéficier d’un effet de levier.
L’idée est que la banque considérera la valeur de votre contrat ainsi que son niveau de risque, et utilisera celui-ci comme garantie afin d’octroyer un crédit (c’est le fonctionnement même d’un crédit Lombard). De la sorte, vous pouvez continuer à bénéficier d’un portefeuille qui offre du dynamisme à votre trésorerie, tout en ayant la possibilité de disposer d’un capital supplémentaire par le nantissement.
Derrière, cela vous permettra de continuer à investir, à travers de l’immobilier locatif notamment.
Enfin, en termes de succession, le contrat ne se dénoue pas, contrairement à une assurance-vie, c’est-à-dire que celui-ci est transmis sans être clôturé, et le bénéficiaire qui héritera du contrat pourra alors bénéficier de son antériorité fiscale.
De plus, pour une personne morale, le contrat sera pris en compte dans le cadre de la valorisation des titres de la société au moment de la succession, et ce sont ces titres qui seront soumis aux éventuels droits de succession.
Comment investir dans l’immobilier avec votre trésorerie entreprise ?
Que ce soit à travers votre contrat de capitalisation ou investissant directement, il peut être judicieux de privilégier l’immobilier pour valoriser votre trésorerie. Cela vous offrira une rente régulière ce qui est synonyme de visibilité.
En tant que chef d’entreprise, il y a fort à parier que vous consacrez une part importante de votre temps à votre activité, et assumer les contraintes de la gestion locative traditionnelle n’est certainement pas ce que vous recherchez. Il existe ainsi d’investir dans de l’immobilier indirectement par ce qu’on appelle communément la pierre-papier.
Les véhicules d’investissement en question sont dénommés SCPI (Société Civile de Placement dans l’Immobilier). N’hésitez pas à consulter notre article sur le sujet pour en savoir plus.
Dans le cas d’un investissement en tant que personne morale, nous allons ici nous focaliser sur une composante intéressante de l’investissement en SCPI : le démembrement.
De manière très simple, lorsque vous achetez des parts, vous avez le choix entre une acquisition en pleine propriété et une acquisition en démembrement, c’est-à-dire partagée entre nue-propriété et usufruit. Lorsque vous investissez au travers de votre société l’opération est très intéressante fiscalement aussi bien pour vous, en tant que particulier, que pour votre entreprise.
Pour désigner le schéma en question, on parle généralement de démembrement croisé.
De cette façon, votre société va acquérir uniquement l’usufruit des parts. Parallèlement, vous achetez de votre côté uniquement la nue-propriété.
Très souvent, les proportions sont de l’ordre de 20% pour l’usufruit, 80% pour la nue-propriété dans ce cadre. L’usufruit donne le droit à percevoir les « fruits » de votre acquisition.
Cela implique, du point de vue de votre entreprise, qu’elle acquiert des parts de SCPI avec une décote de 80% pour percevoir finalement 100% des loyers.
De votre côté, comme vous ne possédez que la nue-propriété, vous ne percevez aucun revenu et n’êtes donc pas fiscalisé à l’impôt sur le revenu.
C’est le premier avantage. Notons qu’il est possible de n’acheter que l’usufruit et de trouver un nu-propriétaire externe.
L’intérêt est que vous évitez de vous endetter personnellement, et dans le même temps l’opération répond parfaitement à une logique de valorisation de trésorerie : votre société acquiert des parts largement décotées pour en percevoir pleinement les revenus pendant la durée du démembrement.
Ensuite, au niveau comptable, l’acquisition de parts en SCPI en usufruit est considérée comme une immobilisation incorporelle qu’il est alors possible d’amortir (uniquement de manière linéaire). Cela diminue finalement le résultat de votre société qui optimise alors son impôt.
Exemple d’un placement de trésorerie en immobilier
Monsieur Findgest souhaite acheter 400 000€ de parts de SCPI, il pourra souscrire en personne à la nue-propriété pour un montant de 80% x 400 000 = 320 000€. Les 80 000€ restants sont souscrits par sa holding Findgest Invest. On suppose que le rendement moyen annuel sera de 5% (ce qui est cohérent avec ce que l’on observe sur le marché).
La holding perçoit donc 20 000€ de revenus annuels. Si la durée de souscription est de 5 ans, alors la société peut amortir, au niveau comptable, cet investissement sur cette durée. Ainsi, ce sont chaque année 80 000/5 = 16 000€ qui sont passés en amortissements.
Finalement, la base imposable à l’IS est seulement de 20 000 – 16 000 = 4 000€. Avec un IS à 15% sa société paye alors 600€ d’impôts. Si l’on ramène ce montant aux revenus perçus, l’impôt payé n’est que de 600/20 000 = 3%.
Une fois la période de démembrement achevée il existe plusieurs possibilités. Soit vous avez uniquement acquis l’usufruit au travers de votre entreprise, et avez trouvé un nu-propriétaire qui récupérera ainsi la pleine propriété des parts.
Dans ce cas, vous avez pu valoriser votre trésorerie d’entreprise en obtenant un rendement réel de 20 000/80 000 = 25% net avant impôts grâce à la décote obtenue à l’acquisition, tout en optimisant fiscalement l’opération. Sinon, vous êtes personnellement nu-propriétaire, ce qui vous permet durant la période de démembrement de ne pas payer d’impôt sur le revenu, puis de recevoir la pleine propriété et de bénéficier d’un complément de revenu par la suite à titre personnel.